Sexion d'assaut, l'homophobie et la liberté artistique

Publié le par In(ter)dépendant

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Quelques temps après, cela me semble intéressant de revenir à froid sur la gestion de la polémique autour du groupe Sexion d’assaut. Pour mémoire, suite à la diffusion des propos homophobes du groupe et aux prises de positions dans le sens du vent du monde politique pour les condamner (taper sur les méchants rappeurs banlieusards, ça coûte pas cher !), de nombreuses municipalités ont fait annuler dans la précipitation les concerts du groupe. Parmi celles-ci, deux villes bretonnes, à savoir Guipavas et Saint-Herblain, alors qu’à l’inverse le concert de Saint-Brieuc a été maintenu. Qu’en penser ?

Il y a évidemment (encore heureux !) consensus pour condamner les actes homophobes en Bretagne et ailleurs. Pour ma part je m’inscris totalement dans les prises de positions des jeunes du PB à ce sujet, et notamment le soutien aux actions des associations LGBT contre les discriminations. Mais ici, la question n’est pas seulement de savoir si l’on condamne les textes homophobes du groupe Sexion d’assaut. Soit les actions du groupe sont attaquables en justice, auquel cas le concert ne peut de toute façon pas avoir lieu. Soit ce n’est pas le cas, et faire interdire le concert revient à censurer une œuvre artistique. Il y a toujours plusieurs interprétations possibles à une œuvre. Interdire celle-ci sur la base d’une seule d’entre elles est totalement arbitraire.  Interdire un concert risque en sus d’avoir l’effet exactement inverse de celui recherché en fournissant une publicité démesurée aux artistes interdits, en particulier auprès des plus jeunes. Ce n’est pas par la censure mais par le débat, notamment dans le cadre de l’école et de la famille, que l’on peut développer une plus grande tolérance dans la société.  

Restreindre la liberté artistique et l’accès à la culture pour des motifs moraux ne constitue jamais une bonne solution. Aujourd’hui, on interdit des concerts sur des motifs qui paraissent louables. Si demain la couleur politique d’une municipalité bretonne évolue vers certains extrêmes, on pourra interdire d’autres expressions considérées comme déviantes autour du même prétexte de valeurs morales. On peut d’ailleurs rappeler le cas du Hellfest, grand festival de metal de Clisson, violemment attaqué il y a quelques mois pour cause de valeurs « malsaines ». Le cas Sexion d'assaut constitue donc un précédent dangereux.

Publié dans Société

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